Pour la première fois, un texte législatif gouvernemental est soumis à une discussion publique ouverte et interactive en ligne, avant son envoi au conseil d’Etat et son adoption en conseil des ministres. Ce texte touche à de nombreux aspects du numérique (neutralité du net, open-data, protection des données, etc).
Pour bien comprendre l'enjeu de cette consultation, la DIST (Direction de l'Information Scientifique et Technique du CNRS) a donné son avis sur le sujet.
"La DIST a préparé en collaboration étroite avec les CORIST (correspondants IST dans les Instituts du CNRS), un ensemble d’éléments de positionnement pour participer à la consultation sur la loi numérique (jusqu’au 18 octobre au plus tard)
I. Dossier d’information
En vue du positionnement de nos collègues dans la Consultation nationale sur le projet de loi numérique, la DIST a mis en ligne un dossier d’information complet.
II. Eléments de positionnement dans le vote
La DIST vous propose ci-après des éléments de réflexion en vue de votre éventuelle participation à la consultation nationale en ligne :
L'article 9 intitulé "Libre accès aux publications scientifiques de la recherche publique" va avoir un impact déterminant sur la recherche française. Il est bien entendu utile de saisir cette occasion inédite de donner notre avis et de proposer des amendements (Participer au vote nécessitera une inscription préalable).
Si vous êtes en phase avec les explications détaillées ci-dessous, il est proposé : 1. De voter contre l’actuelle rédaction de l'article 9. 2. De voter pour la proposition "Une durée d'embargo plus courte, ne pas entraver le TDM (text and data mining) et ne pas interdire une exploitation commerciale"
III. Eléments d’analyse sur la portée du vote
Les publications scientifiques jouent un rôle vital dans le développement de la science, chaque chercheur en est convaincu. Cela, non seulement car elles constituent un produit essentiel de la recherche, notamment pour les applications, mais aussi parce qu'elles nourrissent en retour la recherche fondamentale. En outre, les moyens de recherche, de fouille, dans l'immensité de ces données, rendus possibles par leurs traitements électroniques, sont en train de devenir un enjeu crucial de la recherche.
La future loi sur le numérique devra, entre autres, fixer les droits d'utilisation de ces données. Une question qui fait débat est de décider si un éditeur peut être propriétaire exclusif des droits d'exploitation et, en particulier, s'il acquiert l'exclusivité des droits de fouille des données (TDM : Text and Data Mining) sur les documents et données qu'il publie. S'il en était ainsi en France, cela empêcherait une utilisation libre et gratuite de connaissances issues d'une recherche essentiellement financée par des fonds publics. Cela constituerait un handicap lourd pour la recherche en France, alors que beaucoup de pays (Allemagne, Canada, Etats-Unis, Royaume-Uni) ont clairement opté pour une législation interdisant une appropriation exclusive des données nécessaires au TDM. Ainsi le paragraphe de l’article 9, qui stipule que "Les droits d’exploitation sous une forme numérique [...] sont cessibles à titre exclusif à un éditeur" est en contradiction avec les principes qui ont été énoncés plus haut.
Cette loi prévoit également de fixer la période d'embargo, le délai qui suit la publication d'un article durant lequel l'article n'est pas accessible gratuitement, à un an pour les articles dans les sciences exactes et deux ans dans les sciences humaines et sociales. Pour les mêmes raisons que celles évoquées précédemment, ces délais semblent excessivement longs au regard des dispositions adoptées dans les autres grands pays de recherche. Il serait raisonnable de les ramener à six mois maximum pour les sciences exactes et un an pour les sciences humaines et sociales, en conformité avec ce qui est préconisé par la Commission Européenne sur les programmes ERC et H2020.
Enfin l'Article 9 précise également que la "mise à disposition [d'un article] ne peut donner lieu à aucune exploitation commerciale", formulation sans doute trop vague, puisqu'elle suggère la possibilité pour un éditeur de s’approprier à titre exclusif des bénéfices de toutes natures qui pourraient découler d'une publication scientifique, ce qui, à nouveau, constituerait un frein aux exploitations des travaux scientifiques." Autres documents sur des sujets voisins :
- Tribune "Favoriser la libre diffusion de la culture et des savoirs" publiée dans le journal Le Monde (10/9/2015) Vous pouvez consulter la liste des premiers signataires : ici Il est toujours temps de devenir signataire ici
- Rapport et recommandation du Conseil Scientifique du CNRS sur le projet de loi "pour une république numérique" : ici Source : DIST (CNRS)